Santé au travail : les difficultés des Associations intermédiaires, illustration des insuffisances de la réforme ?

Nous avons déjà abordé à deux reprises la question des Associations intermédiaires, confrontées aux effets de la réforme de la Santé au travail, présentés comme des avancées par les uns, mais vécus comme des contraintes supplémentaires par les autres :

Dans ce dernier article, nous avions fait état de la note signée Yves Calvez, Adjoint de Jean-Denis Combrexelle à la Direction Générale du Travail, et conclu, après l’avoir lue avec attention, que « les Associations Intermédiaires se trouvent donc globalement, après la Note de la DGT, et en dépit de l’intérêt porté au dossier par Monsieur Hamon, dans la même situation qu’avant… », et qu’il faudrait donc « attendre encore un peu pour que leurs questions reçoivent de vraies réponses, s’il en existe… »

Notre attente aura été de courte durée puisque, en réponse à la Question écrite n° 612 de M. Philippe Madrelle (Gironde – SOC), le Ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social a précisé sa position dans le JO Sénat du 04/10/2012. On trouvera ci-dessous les principaux éléments de cette réponse, qui, on ne s’en étonnera pas, reprennent les arguments de la note de Monsieur Calvez sur les deux difficultés principales auxquelles sont confrontées les Associations intermédaires :

  • L’impossibilité des Services interentreprises de répondre aux demandes d’adhésion

« Certaines associations intermédiaires ont fait part de leurs craintes quant à l’incapacité des services de santé au travail interentreprises de répondre, dans les délais exigés et dans un contexte de pénurie médicale, à leur demande d’adhésion. En vertu des dispositions du code du travail, un service de santé au travail interentreprises ne peut s’opposer à une demande d’adhésion d’une entreprise ou d’une association intermédiaire relevant de sa compétence géographique professionnelle ou interprofessionnelle. C’est pourquoi l’attention des directeurs régionaux des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi a été appelée sur d’éventuels refus d’adhésion non motivés. »

  • Commentaire

Si fondée soit-elle au plan juridique, la réponse donnée apparaît pour le moins théorique car nous savons parfaitement que dans certaines régions, les refus d’adhésion existent bel et bien dès lors notamment que le manque de Médecins du travail est important et que plusieurs Services ont la même compétence géographique et professionnelle.

  • Le coût financier

« La principale difficulté réside dans le coût financier que représente, pour les associations intermédiaires, l’adhésion à un service de santé au travail pour assurer le suivi de la santé de leurs travailleurs mis à disposition. Il faut tout d’abord rappeler que le coût de cette adhésion ne permet pas uniquement de financer une visite d’embauche, mais bien d’assurer un suivi de la santé des travailleurs et de donner des conseils aux associations intermédiaires en matière de prévention des risques professionnels, mais aussi, par exemple, en matière de conduites addictives. Par ailleurs, afin d’atténuer cette charge financière supplémentaire pour les associations intermédiaires, une réflexion est actuellement menée par le Gouvernement en lien avec la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés pour modifier les critères et les modalités de leur cotisation AT-MP, répondant ainsi à une demande des associations intermédiaires. Il s’agira notamment de calculer leur cotisation en fonction de la sinistralité constatée ce qui devrait baisser leur cotisation et contribuer aussi à valoriser financièrement les actions de prévention des risques professionnels proposées par les services de santé au travail. »

  • Commentaire

La réponse donnée apparaît très théorique une fois encore, à un double titre : d’une part, au niveau de la prestation réellement offerte en contrepartie de la cotisation, qui, pour diverses raisons, va rarement au-delà du simple examen médical (si tant est que celui-ci puisse être réalisé) ; d’autre part, à celui des aménagements possibles en termes de financement. Il est à craindre que les effets de ces propositions, si elles voient le jour, soient limités et ne répondent pas aux attentes des Associations intermédiaires.

On retiendra pour terminer la volonté, très louable, d’élaborer un guide « pour expliciter les enjeux de la réforme de la médecine du travail, sensibiliser tous les acteurs et donner des repères pour une adhésion réussie à un service de santé au travail. »

Exprimée exactement dans les mêmes termes que dans la note de Monsieur Calvez, elle semble relever davantage de la méthode Coué ou du voeu pieux…

Finalement, on en est toujours pratiquement au même stade, ce qui devrait conduire logiquement à repenser complètement le suivi des travailleurs concernés. L’impasse constatée n’est-elle pas en réalité une simple illustration des insuffisances de la réforme ?

Gabriel Paillereau

Copyright epHYGIE octobre 2012

Tous droits réservés

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *